Profession : mendiant – Les rues de Dakar prises d’assaut

3 mai 2012

Profession : mendiant – Les rues de Dakar prises d’assaut

Au pays de la Téranga, donner au pauvre est une obligation sociale. Ce n’est pas tout : plus de 80% de la population est de confession musulmane, religion dans laquelle l’aumône est un pilier. De ce fait, le paysage urbain à Dakar est envahi de mendiants de toutes sortes. Des non voyants aux personnes saines de corps et d’esprit en passant par les handicapés moteurs, la manche est ici un travail à plein temps.
Centre-ville de Dakar. Des handicapés moteurs squattent les grandes artères. En fauteuils roulants ou avec des béquilles, des hommes et femmes de tout âge slaloment entre les voitures à la faveur des nombreux embouteillages, en quête d’une pièce de monnaie. Le business semble bien marché pour Khady qui confie, le sourire aux lèvres :  » Je gagne entre 3 000 et 4 000 francs selon les jours.  »

Bien de gens ne donnent qu’aux handicapés car ils «  ont une bonne raison de mendier contrairement à d’autres qui ont tous leurs membres au complet « , pense Mohamed, un commerçant. Mais il n’y a pas que des handicapés moteurs qui mendient. Escortés par un membre de leur famille qui fait office de guide, les non voyants circulent aux alentours des mosquées, des églises ainsi que des hôpitaux, à la recherche d’une âme charitable. S’aidant des versets coraniques qu’ils récitent sans faille, pour rappeler au musulman sénégalais l’un des piliers de l’islam : l’aumône.

L’association des sourds et muets

Quant aux sourds et muets, les transports en commun sont leurs lieux de prédilection. Ils se sont  constitués en associations et partagent le même mode opératoire. Ils sont munis d’une feuille sur laquelle sont soigneusement consignées leurs doléances telles que  » L’association des sourds muets sollicite votre aide financière « . Ils montent dans un bus, distribuent leurs papiers aux passagers et ceux-ci les leur rendent, le tout accompagné d’une pièce. Après avoir fait le tour d’un véhicule, ils descendent à un arrêt et attendent le bus suivant, pour recommencer leur manège. Certaines personnes commencent toutefois à s’en agacer. «  Ce n’est pas parce qu’on est sourd muet qu’on doit refuser de travailler et importuner les gens à longueur de journée « , lance un jeune dans un bus.

Les albinos 

Les albinos mendient également. Pour certains d’entre eux, la manche est même un travail à plein temps. En effet, il n’est pas rare de voir une personne dans la rue à la recherche d’albinos pour lui faire une offrande que son marabout lui aurait prescrite. Cette pratique est courante et acceptée dans la société sénégalaise.

Mendier au nom de la religion ?

Les bayes fall sont des mendiants à part. Ce sont des jeunes hommes robustes et sains, habillés d’une multitude de boubous, les rastas noués avec un foulard et la taille ornée d’une ficelle en cuir. Ils s’en vont chaussettes au pied, collecter l’aumône due à leur guide religieux. C’est dans les banlieues de Dakar, où la ferveur des mourides est plus perceptible, qu’ils sont les plus nombreux. Calebasse en main, ils sillonnent les ruelles sableuses, en chantant à gorge déployée les khassaïdes (chants religieux) de Serigne Touba (fondateur du mouridisme). Les bayes fall sont également présents dans quelques quartiers résidentiels de façon sporadique, ainsi qu’aux marchés.

On parle également des talibés. Ils forment le groupe le plus représentatif de mendiants au Sénégal. On les voit dans tous les quartiers de Dakar, de jour comme de nuit.  Ce sont des jeunes garçons qui ont entre 5 et 12 ans, venus de l’intérieur du Sénégal. Leurs parents les envoient étudier le Coran chez un marabout. Cependant ces enfants passent le plus clair de leur temps à mendier, pieds nus et vêtus de haillons.

Daara moderne comme solution

Les talibés préoccupent plus d’une personne. Le Président Abdoulaye Wade parlait souvent de  » daaras «  (écoles coraniques) modernes, pour résoudre le problème des talibés. Certains marabouts ont entendu cet appel. C’est le cas de Serigne Hady Touré qui dirige un daara moderne aux Parcelles assainies, un quartier de la banlieue dakaroise. L’école a été créée en 2009 et «  Ici, les enfants (environ 60) apprennent le Coran moyennant 20 000 francs pour ceux qui sont internés (une trentaine) « . Il se plaint toutefois que «  cette mensualité est insuffisante pour couvrir toutes les dépenses « . Malgré cela, les enfants dont il a la charge ne mendient pas, selon ses dires. Il déplore par ailleurs le manque de volonté de l’Etat concernant ce genre de projet, car il n’a perçu aucune aide des autorités.
Amara Soumah pour Africavox
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